Travaux en cours
et ça va durer...
l'Épaule
La COIFFE IRREPARABLE
Si vous avez un tendon irréparable, cela peut être considéré un signe d’une articulation assez performante.
C’est un argumentaire contorsionniste, mais essayez de le suivre et vous verrez que ça tient la route car cette articulation est parfaitement logique
Le fait que vous avez réussi a passer autant d’années avec un tendon rompu sans trop de dis-confort signifie que votre articulation à certaines particularités anatomiques (une glène orientée légèrement vers le bas, un acromion un poil plus court etc) ou des capacités spontanées de compensation qui lui ont permis de fonctionner dans des paramètres correctes avec un tendon en moins. Typiquement la douleur fini par se déclencher une fois que cet équilibre fragile est perturbé par la rupture d’un deuxième tendon.
Sur votre compte rendu d’IRM c’est écrit : « Oh la la ! Le tendon est trop rétracté et la dégénérescence graisseuse en stade trop avancé, on ne peut pas vous opérer » et tout cela rime. Dans un certain sens, c’est vrai, une fois que la dégénérescence graisseuse dépasse la moitié du volume musculaire on n’obtiendra rien en réparant son tendon, car il ne pourra pas fonctionner.
Mais cela est un handicap qu’on a gardé depuis l’époque de la chirurgie à ciel ouvert. A l’époque, on faisait l’incision pile en face du tendon, on réparait ce qu’on pouvait, et nos résultats étaient ce qu’ils étaient. Réparer l’infra épineux ou le sub scapulaire était compliqué car il fallait tourner l’humérus, on ne voyait pas grande chose, alors on se concentrait sur ce qu’on savait faire, le supra épineux.
Comme c’est le tendon qui est le plus fréquemment atteint, le fait de dire « votre coiffe des rotateurs est irréparable » signifiait en fait « votre sus épineux est irréparable » et si on ne pouvait pas réparer le supra épineux, on n’opérait pas.
Sauf que dans le cas d’un patient qui vient de passer peut-être dix ans avec un supra épineux rompu sans en être trop gêné, il est clair qu’il ne vient pas nous voir pour son sus épineux. C’est la douleur qui l’empêche de dormir depuis quelques mois qui l’amène. Il est évident que la douleur avait été précipité par quelque chose d’autre, un événement qui date de pas plus que quelques mois.
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Pour arriver au stade ou un tendon n'est plus réparable, il faut que ce tendon reste rompu pendant plusieurs années. Ce qui arrive d’habitude c’est que ces patients ont pu être confortables pendant aussi longtemps parce que les deux grands muscles restants de la coiffe, l’infra épineux et le sub scapulaire avaient pris le relai et avaient réussi a maintenir à eux deux un centrage convenable de la tête humérale.
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Les deux tendons, par contre, étant atteints par le même problème de tendinopathie que leur confrère, se sont dégradés pendant ce temps et la surcharge de travail qu’ils ont du assumer ne les a pas aidé.
Des qu’il y a un deuxième tendon qui commence à lâcher, ce fragile équilibre est définitivement perdu et avec ce qu’il reste comme attaches musculaires le centrage de la tête humérale ne peut plus être maintenu. Alors le deltoïde commence enfin a comprimer la tête humérale contre l’acromion, l’espace sous acromial devient inflammatoire et le patient découvre qu’il a un supra épineux irréparable sur le compte rendu de son IRM.
Ce qu’on a commencé récemment à faire c’est d’ignorer le sus épineux, comme vous l’avez fait pendant tout ce temps et de porter notre attention sur la rupture du tendon plus récente qui est responsable pour cette perte du centrage. En général, qui dit récent, dit réparable et si on répare l’un ou parfois les deux tendons, on finit par retrouver une articulation indolore.
On obtient ainsi une épaule qui ressemble à celle d’il y a un an ou deux, qui manque le supra épineux sans que cela fasse une grande différence, car le couple sub scapulaire et infra épineux fonctionne de nouveau.
Il y a quelques autres options, comme la plastie de la capsule supérieure ou le ballonnet, mais chaque fois que je finis d’expliquer au patients ce que ça vaut en réalité, ils préfèrent renoncer.
